à Jacqueline

La petite cigale provençale (1) est un insecte (1 paire d'antennes et 3 paires de pattes) de l'ordre des hémiptères. Les hémiptères comme les punaises, les pucerons et les cigales se caractérisent par la présence de pièces buccales de type piqueur-suceur formant un rostre articulé (*).
La petite cigale ou cigale grise ou cacan est l'une des trois "vraies" cigales de France métropolitaine (2) avec la cigale plébéienne (Lyristes plebejus) et la cigale noire (Cicada atra).

L'animal adute se rencontre au cours de l'été sur des rameaux dont il prélève la sève pour s'alimenter (Fig1).
La forme adulte vit 4 mois.

▲ Fig1: Cigale grise (Cicada orni). L'animal mesure à peu près 2,5 cm de long (sans les ailes).
(A = Antenne, Œ = œil composé, P1, P2, P3 = pattes marcheuses, Al1 = aile de la première paire)

La tête porte une paire d'antennes et une paire d'yeux composés.
La première paire d'ailes est puissante alors que la deuxième est plus courte et finement membraneuse. L'aile postérieure est tenue à l'antérieure par un système de "clipsage" en gouttière.
Les 3 paires de pattes sont typiquement marcheuses avec de longs tibias et des griffes à l'extrémité du tarse. Ces griffes permettent à la cigale adulte de s'accrocher sur l'écorce des végétaux.

Juste après la mue imaginale (**) les mâles cymbalisent activement ce qui attire l'attention des femelles.
La cymbalisation est l'émission par le mâle d'un son rythmé qui est un "chant" d'appel nuptial (5).
Le son est produit par les déformations à haute fréquence de 2 disques chitineux spécialisés: les cymbales (4) situées sur le premier segment abdominal du mâle (face ventrale).
La femelle n'est pas équipée de cymbales.
Mâles et femelles ont un appareil auditif.

L'enregistrement est bruyant! Il permet d'établir un spectre de fréquences sonores (Fig2) dans la bande de fréquence de 2 KHz à 12 KHz caractéristique du chant des cigales.

▲ Fig2: Spectre de fréquences sonores de l'enregistrement [Audacity].

La comparaison avec des données publiées (Fig3) permet d'identifier un mâle de C. orni comme l'interprète principal de l'enregistrement.

▲ Fig3: Comparaison des spectres de fréquences sonores
de Cicada orni et de Lyristes plebejus, graphiques construits d'après (6) et (7).

En effet on constate que la hauteur musicale des sons produits par C. orni présente une fréquence d'amplitude maximale vers 4,5 KHz alors que cette fréquence est décalée vers l'aigu (6 KHz) chez L. plebejus.
Ainsi les femelles de C. orni peuvent distinguer les mâles de leur espèce.

La femelle attirée par le signal sonore d'un mâle de son espèce se pose à coté de lui. Pendant quelques instants les 2 partenaires échangent des signaux tactiles, sorte de préliminaires et nouveaux signaux de reconnaissance (Fig4).

▲ Fig4: Couple de cigales grises (Cicada orni) échangeant des signaux tactiles d'après (3).

Après accouplement et fécondation la femelle pond des œufs sur les branches. Les jeunes larves qui en sortent se laissent tomber au sol. Elles vont vivre pendant 4 ans en creusant des galeries souterraines et en s'alimentant de la sève des plantes qu'elles prélèvent sur les racines.
L'animal ne réapparaît en surface que pour sa métamorphose (***) en adulte reproducteur.
Il laisse une exuvie lustrée accrochée à un brin d'herbe ou sur un tronc (Fig5).

Cette exuvie se distingue de celle de Lyristes plebejus par:

• La propreté de la cuticule qui est terreuse chez L. plebejus,
• les dimensions; la plus grande longueur de l'exuvie est de 2,5 cm chez C. orni,
• l'absence de tubercule abdominal entre les pattes P2 et P3. Ce tubercule est présent chez L. plebejus.

▲ Fig5: Exuvie lustrée de cigale grise (Cicada orni) sur une branche d'arbre.

Les tubes blancs au dessus de la tête sont des trachées. L'adulte s'extrait de l'enveloppe par une déchirure dorsale qui affecte la tête et le thorax mais pas l'abdomen dont les tergites sont intacts.
On remarque la spécialisation de la première paire de pattes qui présente un tibia en pioche, des crochets et une lame de scie sur le fémur. L'appareil permet de forer des galeries dans le sol et de scier des racines.

Une autre exuvie trouvée sur un brin d'herbe (Fig6) permet d'observer le rostre piqueur-suceur (Ro).
Les fourreaux (FA) qui contiennent les ailes sont petits. Les ailes vont s'allonger juste après la mue de l'animal qui est devenu aérien. Elles vont dépasser la pointe de l'abdomen.

▲ Fig6: Exuvie de cigale grise (Cicada orni)
(A = antenne, Œ = œil, Tra = trachée, Ro = rostre piqueur-suceur, FA = fourreau alaire,
P1 = première patte adaptée, P2 et P3 = Pattes marcheuses).

Remarques:
▲ (*) L'ordre des hémiptères tire son nom de la présence d'une partie chitineuse sur la première paire d'ailes. La partie distale restant membraneuse. Néanmoins ce caractère n'est pas constant. Il est net chez les punaises mais les pucerons et les cigales possèdent 2 paires d'ailes membraneuses. Le caractère partagé entre tous les membres du groupe est la présence de 2 paires d'ailes et d'un rostre articulé de type piqueur-suceur.
▲ (**) La mue imaginale est la dernière mue des insectes. L'animal abandonne sa dernière enveloppe. Il apparaît ainsi la forme adulte et reproductrice qui est l'imago ("image" de l'espèce, concept très-trop platonicien).
L'adulte étant souvent très différent de la larve, cette dernière mue coïncide avec la métamorphose.
▲ (***) La métamorphose (= changement de forme) est la dernière étape du développement indirect. L'éclosion de l'œuf libère une larve qui peut être très différente de l'adulte, s'alimenter autrement et vivre dans un autre milieu. La métamorphose est la transformation de la larve en la forme adulte (ex: chenille --> papillon).

Références: